Un Bal dans la Nuit

Quand les habitués passèrent la porte, le bar était méconnaissable. Brusquement, ils furent plongés dans un univers à la fois mécanique, vaporeux, aussi esthétique qu'extraordinairement fou. Ca et là ils pouvaient voir des automates faits de divers rouages s'animer, les saluer, parfois même essayer de les retenir. Une petite danse, peut être ?

Quelques tentures d'un or sombre, des alcôves dissimulées aux regards et où il ferait bon se lover pour regarder le temps passer... Ces aiguilles qui courent sur l'immense pendule accrochée au fond du bar et dont le tic tac semble vouloir rappeler à tous que rien, jamais, n'est immuable. Des danseuses, vêtues de corsets et de jupes retroussées, habillent la pièce principale. Partout où leurs yeux se posent, des objets attirent leur attention. Boussoles, pendules, fioles remplies de liquides colorés... comme autant de trésors ayant appartenu à de mystérieux navigateurs, pirates de l'air, empoisonneuses. L'imagination fait le reste et l'on se perd dans des récits venus d'un autre temps, où les batailles se faisaient dans le ciel, où de folles machines crachaient une vapeur blanche qui nimbait les ruelles, ou les robes des dames rivalisaient d'originalité. Il fait sombre, mais les lumières réchauffent les lieux et l'ambiance est à la rêverie, la détente, enfin... un autre monde, un entre deux, un instant où plus rien ne compte. Juste cette jeune fille, là, qui se tient devant une boîte à musique à taille humaine et lui arrache des notes délicieuses, juste la fumée de la cigarette qui se consume, oubliée, sur le bar, juste cette formidable panique des sens que l'on ressent, juste...

Se laisser aller.
Oublier.
Vivre...

Bienvenue.